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Arrigo Boito

February 25, 1842 - Padoue (Italy) — June 10, 1918 - Milan (Italie)

Biographie

Arrigo Boito est un compositeur, librettiste, poète et écrivain italien. Il naît le 24 février 1842 dans la ville de Padoue, en Italie. Sa mère est une comtesse d’origine polonaise, et son père exerce la profession de miniaturiste. Il évolue dès sa jeunesse dans un milieu aux aspirations littéraires et artistiques. Il côtoie notamment le peintre Emilio Praga, le poète Ugo Tarchetti et le compositeur Franco Faccio, portés par le mouvement Scapigliatura se développant à Milan. Ensemble, ils créent un collectif homonyme et prônent la rébellion contre le conformisme et la superficialité de l’art, dans la lignée des mouvements bohèmes parisiens quelques années plus tôt, représentés par Baudelaire notamment. Sa vingtaine est le temps d’une forme de débauche et de recherche d’idéal artistique.

Dans le même temps, Arrigo Boito se forme à la musique au conservatoire de Milan entre 1855 et 1860 : violon, piano et composition. Sa plume de compositeur lui permet de nourrir son aspiration en faveur d’un romantisme européen, et non limité à l’identité italienne seule. Aux côtés de son ami Franco Faccio, il compose une cantate patriotique intitulée Il quattro Giugno (Le 4 quatre septembre), puis Le Sorelle d’Italia (Les sœurs d’Italie), qu’ils définissent respectivement comme un mystère lyrique en deux parties avec prologue, une cantate de célébration pour solistes, chœur et orchestre en faveur de l’indépendance italienne et une culture supranationale.

Ces œuvres à pendant politique lui permettent d’obtenir le soutien financier du roi Victor-Emmanuel II pour partir s’installer à Paris où il découvre les milieux intellectuels locaux et la musique française. Il rencontre ainsi Berlioz, Meyerbeer et Rossini, arrivé quelques années plus tôt dans la capitale française. Il assiste également à de nombreuses représentations wagnériennes. Ces rencontres et découvertes permettent au compositeur d’affiner davantage son esthétique musicale aussi bien que littéraire, lui qui souhaite attribuer au livret et à l’œuvre littéraire le rôle de fondation à l’œuvre musicale. Outre cette caractéristique, il s’oriente vers une esthétique musicale entre le romantisme hérité des Allemands et des codes italiens classiques. Il se familiarise ainsi avec les thèses des philosophes Nietzsche et Schopenhauer.

Deux ans plus tard, le musicien retourne à Milan où il compose, crée, et dirige en 1868 l’une de ses œuvres les plus notables, Mefistofele, en en réalisant à la fois le livret et la musique. L’importance qu’il accorde à l’œuvre littéraire d’origine et au livret lui confère une certaine notoriété et il se voit commander plusieurs livrets dans les années suivantes, dont pour un certain Giuseppe Verdi, avec qui il entretient des échanges fréquents et chez qui il trouve écho à ses idéaux.

Parallèlement à ses projets musicaux, Boito expose ses idéaux artistiques dans diverses chroniques et s’adonne aux essais à portée presque philosophique. Son assise dans le milieu intellectuel lui ouvre la voie vers une carrière plus administrative : il est d’abord nommé inspecteur général des conservatoires de musique italiens, puis sénateur, à la fin des années 1870, alors qu’il a à peine 40 ans. Il reçoit le titre honorifique de docteur honoris causa des Universités d’Oxford et de Cambridge, obtenant ainsi la possibilité d’enseigner la composition, qu’il délaisse par ailleurs, et d’exposer sa thèse esthétique.

Il meurt le 10 juin 1918 à Milan, à l’âge de 76 ans, laissant derrière lui quelques pièces achevées à titre posthume par ses confrères.

Compositeur, librettiste, écrivain : les multiples facettes d’Arrigo Boito

La nature des œuvres d’Arrigo Boito est multiple : pièces lyriques, chansons, livrets, essais, poèmes, nouvelles. Il se considère en effet autant compositeur qu’écrivain et ne délaisse aucun support.

Les pièces lyriques qu’il compose ont pour particularité de s’appuyer sur un livret qu’il a lui-même écrit, tandis que la musique est souvent réalisée avec un confrère. Ses premières œuvres, Il Quattro Giugno et Le Sorelle d’Italia (1860 et 1861) sont ainsi co-composées avec son ami Franco Faccio. Nerone, débuté en 1870 est achevé à titre posthume par les compositeurs Antonio Smareglia et Vincenzo Tommasini, et créé sous la baguette de Toscanini en 1924 à la Scala de Milan.

Outre ces quelques pièces de sa composition, Boito a signé près d’une vingtaine de livrets d’opéras, la plupart étant des commandes. Il est notamment l’auteur du livret de La Gioconda d'Amilcare Ponchielli, créé en 1876. La Gioconda (La Joconde) est un opéra en quatre actes, inspiré du drame en prose de Victor Hugo, Angelo, tyran de Padoue. Boito démontre ainsi son intérêt littéraire varié. Il puise ainsi plusieurs fois dans le répertoire du dramaturge Shakespeare, ce qui instaure sa notoriété en tant que librettiste : il écrit ainsi le livret d’Amleto d’après Hamlet pour son ami Faccio en 1865, mais surtout ceux de trois œuvres de Verdi : Simon Boccanegra dont il réécrit le livret original en 1881, Otello (1887) et Falstaff (1893). Sa connaissance du français et de l’allemand lui permet de traduire en italien les livrets de Wagner ainsi que les œuvres de Shakespeare, de manière souvent préliminaire à ses propres travaux.

Boito mène à bien ses activités de romancier, en s’illustrant par ses essais sur la musique et l’esthétique, et dans les genres de la poésie, du théâtre et des nouvelles littéraires. Une dizaine d’œuvres de ces trois genres sont ainsi répertoriées, certaines remaniées dans plusieurs versions. Le poème Re Orso (Le Roi Ours, 1864) est une sorte d’épopée fantastique en vers et en prose mais semblant indiquer des éléments musicaux et des parties vocales.

Il fait publier cinq nouvelles entre 1867 et 1874, la plus célèbre étant l’Alfier Nero ou Le Fou Noir, sa première nouvelle, dans laquelle deux hommes se livrent à un combat intense mais étudié par l’auteur comme une partie d’échecs.

Mefistofele, chef-d’œuvre d’Arrigo Boito

Sa fréquentation des salons et milieux intellectuels parisiens lors de son séjour en France sont l’origine de l’une des œuvres les plus célèbres et les plus représentatives de la recherche d’Arrigo Boito : Mefistofele. Le personnage de Méphistophélès est largement repris à la fois dans la littérature et dans la musique à travers l’histoire de Faust : par Goethe, auteur de référence du mouvement romantique allemand, Berlioz, Gounod, ou encore Liszt. 

Par la place conférée au livret dont doivent découler les parties musicales, et non l’inverse, Arrigo Boito propose un drame lyrique à la trame et à la musique complexes, dans un style avant-gardiste bien éloignée de l’usage bel cantiste où les voix priment sur le reste. Il en dirige la première à la Scala de Milan le 5 mars 1868 mais le public milanais exprime son mécontentement, ce qui stoppe la production au bout de deux représentations.

Investi dans ce projet, le compositeur propose des versions révisées en 1875 au public bolognais, vénitien (1876), à Boston (1880, en anglais), Londres la même année, et enfin à Milan en 1881. L’œuvre sera finalement jouée en italien sur les scènes parisiennes en 1919, puis délaissée au profit des œuvres faustiennes plus célèbres.