Mieczysław Weinberg
December 8, 1919 - Varsovie (Pologne) — February 26, 1996 - Moscou (Russie)
Biographie
Mieczysław Weinberg est un compositeur russe d’origine polonaise. Il naît à Varsovie le 8 décembre 1919 et fréquente dès son plus jeune âge le milieu de la musique grâce à son père, un musicien engagé dans plusieurs théâtres mais également directeur temporaire du département de musique juive de la maison de disque Syrena.
Dès ses 10 ans, il entre au conservatoire de Varsovie où il étudie le piano auprès du musicien et pianiste Józef Turczyński. Ce dernier a notamment œuvré pour l’enseignement et la diffusion des œuvres du pianiste polonais Frédéric Chopin, en en publiant un recueil d’œuvres complètes pour piano. Weinberg ressort diplômé en 1939, âgé d’à peine 20 ans.
Ces années d’étude sont l’occasion pour le compositeur russo-polonais de coucher sur le papier ses premières pièces, largement inspirées des mélodies et airs qu’il a entendus au théâtre. Il signe ainsi plusieurs mazurkas, et son niveau pianistique lui permet d’être engagé comme pianiste et improvisateur dans un restaurant renommé de la capitale. C’est dans ce cadre qu’il rencontre le pianiste polonais Josef Hofmann, qui l’invite à poursuivre son apprentissage à l’Institut Curtis à Philadelphie.
Cependant, 1939 marque également le début de la guerre et l’invasion de la Pologne par l’Allemagne. Tous les membres de sa famille sont arrêtés. Lui seul parvient à s’enfuir et trouve asile en URSS, à Minsk, où il demande la naturalisation soviétique et prend ainsi le nom de Moisei Vainberg. Il y débute un nouveau cycle de deux ans d'études, cette fois en composition, auprès du compositeur russe Vassili Zolotarev, au conservatoire local. Ce cycle se conclut par la composition d’un poème symphonique pour orchestre, dirigé par Ilya Musin pour l’obtention de son diplôme en 1941. Il y rencontre également Natalia Mikhoels, fille de l’acteur Solomon Mikhoels, et l’épouse.
Quelques heures après l’obtention de son diplôme, l’URSS est envahie. Il parvient à nouveau à s’enfuir et trouve refuge parmi d’autres exilés de confession juive, à Tachkent, en Ouzbékistan. C’est par leur intermédiaire et notamment grâce à Israël Finkelstein qu’il entre en relation avec le compositeur russe Dmitri Chostakovitch. Après quelques échanges de partitions, notamment la Symphonie n° 1 en sol mineur (1942), les deux hommes se rencontrent en 1943 et tissent une amitié pérenne. Chostakovitch estime le travail du jeune compositeur et lui vient plusieurs fois en aide, pour l’aider à s’installer à Moscou puis pour faire tomber les accusations contre lui lorsqu’il compose son opéra La Passagère en 1967.
La mort de Staline en 1953 donne un nouveau souffle à la carrière du musicien dont les œuvres sont largement diffusées dans la décennie suivante, et interprétées par de nombreux musiciens émérites russes tels que Mstislav Rostropovitch, David Oïstrakh, Leonid Kogan, ou encore Rudolf Barshaï. Il a délaissé les mazurkas pour des romances, des pièces de chambre, et des symphonies, aux formations instrumentales ou vocales. Cela lui confère une certaine notoriété dans le milieu fermé des compositeurs russes, au même titre que ses confrères Chostakovitch et Prokofiev. Il acquiert une modeste notoriété à l’international grâce à sa musique pour le film Quand passent les cigognes de Mikhaïl Kalatozov, primé au Festival de Cannes de 1958.
En 1987, il compose les Symphonies de chambre n° 1 et n° 2, qui lui font gagner le Prix d’État de l’URSS trois ans plus tard. La Symphonie n° 22 débutée en 1994 sera achevée à titre posthume. Le compositeur meurt le 26 février 1996 à Moscou après plusieurs années de maladie.
Mieczysław Weinberg, musicien en exil
Weinberg a composé plus de 500 œuvres dont environ 150 ont été éditées : chansons, romances, musique de chambre, sonates, symphonies, opéras… Il est le compositeur par exemple de 7 opéras et 22 symphonies.
Le style musical de Weinberg est imprégné de ses souvenirs d’enfance, des rencontres musicales qu’il a faites et des situations qu’il a dû affronter. La reprise d’éléments du folklore juif, ou encore du music-hall qu’il a fréquenté dans sa jeunesse, sont fréquents dans ses œuvres.
À partir des années 1950, la relation amicale qu’il entretient avec Dmitri Chostakovitch teinte ses réalisations du style de son confrère. Ses œuvres requièrent par ailleurs une certaine virtuosité, en particulier pour les pupitres de cordes. Les deux musiciens s’échangent régulièrement des idées musicales et se font concurrence dans la composition de quatuors à cordes. Ils s’exercent à réduire pour quatre mains les pièces orchestrales de chacun.
En 1968, Weinberg compose pour le violoncelliste Mstislav Rostropovitch les 24 Préludes pour violoncelle seul, qui ont un caractère à la fois tourmenté et provocateur, peut-être reflet de l’ambiance générale. Ils ne seront finalement pas joués par le musicien.
Les sources d’inspiration du musicien sont liées aux contextes politiques, géographiques et culturels dans lesquels il évolue. Ces inspirations sont explicitées dans ses œuvres lyriques. En 1942, il compose avec ses confrères Tohtasyn Dzhalilov, Alexei Klumov et Talib Sadykov l’opéra L’Épée d’Ouzbékistan alors qu’il est réfugié dans le pays. Cette première pièce lyrique l’initie aux compositions pour la voix. Deux ans plus tard, il met en musique les Chants juifs d’après des poèmes soviétiques juifs de Samuel Galkine. Deux de ces opéras sont entrés au répertoire des opéras russes, témoignant à la fois de l’histoire, du vécu du compositeur et de son assimilation à la culture russe. La Passagère, opéra en deux actes, huit scènes et un épilogue, sur un livret d’Alexandre Medvedev, s’inspire du récit de Zofia Posmysz, écrivaine polonaise survivante de l’Holocauste. Outre le style musical parfois provocateur, le manque d’émotions liées au livret dessert le musicien qui est arrêté. Plusieurs années plus tard, en 1985, il compose L’Idiot, opéra en quatre actes et dix scènes, adapté par le même librettiste du roman éponyme de l’auteur russe Dostoïevski, dans lequel le principal protagoniste éprouve tellement de compassion pour les autres qu’il est jugé idiot. Il dédie la pièce à son ami Chostakovitch, décédé 10 ans plus tôt. L’opéra ne sera créé qu’à titre posthume et sera un succès immédiat.
L’œuvre de Mieczysław Weinberg sur medici.tv
Les œuvres de Mieczysław Weinberg, bien que nombreuses et reconnues au sein du répertoire musical du 20e siècle, sont peu jouées et moins d’un tiers a été édité. L’influence du contexte politique inhérente aux œuvres a probablement favorisé cela. Le musicien a par ailleurs vécu ses dernières années dans une situation précaire.
Cependant, le violoniste virtuose letton Gidon Kremer œuvre largement à la mise en lumière de ce compositeur très actif et témoin de l’histoire. Le violoniste a notamment contribué à l’édition de partitions, à la transcription de pièces pour son instrument, proposant ainsi les premiers enregistrements mondiaux des pièces du compositeur. Parmi ces créations mondiales, il faut citer les 24 préludes pour violoncelle seul, op. 100 dédiés à Rostropovitch qui ne les avait pas joués, et que le violoniste a arrangé en Préludes pour violon seul.