Vladimir Ashkenazy joue Schubert et Schumann

Filmé en 1987 pour la série « Music in Camera » de la BBC, ce film immortalise Vladimir Ashkenazy au piano dans un cadre exceptionnellement intime. Enregistré dans les studios de la BBC à Glasgow, devant un public d'invités, le grand pianiste d'origine russe interprète deux programmes consacrés chacun à un compositeur, respectivement Schumann et Schubert. Ce récital montre son talent pianistique à son apogée et révèle nombre de ses qualités de soliste tout à fait remarquables.

Ashkenazy était un pianiste célèbre bien avant de se mettre à la direction d'orchestre. Né à Gorki (aujourd'hui Nijni Novgorod) en 1937, il commença à prendre des leçons à l'âge de six ans ; plus tard, il étudia au Conservatoire de Moscou sous la direction du professeur Lev Oborine. Sa carrière démarra sur les chapeaux de roues par un trio de récompenses lors de concours internationaux : deuxième prix au Concours International Chopin de Varsovie en 1955, premier prix au Concours Reine Elisabeth de Bruxelles un an plus tard, et enfin premier prix ex æquo avec John Ogdon au Concours Tchaïkovski de Moscou en 1962. Il s'était inscrit à ce dernier sous la contrainte et a ultérieurement expliqué la manière dont le Ministre de la culture soviétique, furieux du succès du pianiste américain Van Cliburn au concours précédent, avait exercé une forte pression sur les étudiants russes pour qu'ils prennent part à cette compétition.

Un an plus tard, Ashkenazy quitta l'URSS avec son épouse Islandaise. Le couple s'installa d'abord à Londres, et ultérieurement en Suisse. Présent à Londres durant les années soixante, Ashkenazy noua des relations musicales fructueuses avec ses contemporains de la « golden génération », notamment Daniel Barenboïm, Pinchas Zukerman et Zubin Mehta. Il ne retourna en Russie qu'en 1989. Lors de son voyage, une équipe de tournage l'accompagna pour documenter son expérience.

Vladimir Ashkenazy a toujours été doué d'une facilité extraordinaire pour assimiler la musique rapidement, mais aussi d'une rare humilité face à sa célébrité internationale. Dans une interview, il avait déclaré : « La musique est un don fabuleux de Dieu et de la nature. Je ne suis qu'un exécutant et je n'ai pas le génie créatif d'un Bach ou d'un Chostakovitch, donc je me sens extrêmement humble devant eux. Mon but est d'être un serviteur qui fasse vivre cette musique ».

Le romantisme naissant de Schubert et de Schumann convient parfaitement au talent pianistique d'Ashkenazy, sensible et réservé. Ce film porte témoignage face à toute nouvelle génération de mélomanes de l'extraordinaire musicalité Vladimir Ashkenazy.

Jessica Duchen (traduction : Sophie Liwszyc)