Marek Janowski, chef d'orchestre et professeur

Marek Janowski a dirigé l'Orchestre Philharmonique de Radio France entre 1984 et 2000. De tradition germanique, passé par les plus grands orchestres d'Allemagne dont il a reçu les enseignements de rigueur formelle et de poésie, il a choisi pour cette « Leçon particulière » qui constitue son unique incursion dans le domaine de la pédagogie, deux œuvres emblématiques de son répertoire : la Symphonie Jupiter de Mozart et I'Ouverture Egmont de Beethoven. Tourné en 1989 au studio 103 de la Maison de Radio France, aujourd'hui détruit, et à la Cathédrale de Cologne où il dirigeait le Requiem de Berlioz, Marek Janowski prodigue des conseils d'interprétation au jeune chef Olivier Dejours qui se fera bientôt connaître dans la création contemporaine.

Tout l'art du réalisateur Michel Follin dans ce film inspiré est de laisser intacte l'image du chef d'orchestre, maître de musique s'il en est et figure emblématique de la civilisation occidentale. L'enseignement de la direction d'orchestre reste pour tous une énigme car sa technicité se résume à quelques règles que d'ailleurs tous les chefs ne partagent pas. Pour Marek Janowski, c'est l'expérience qui fait le chef. Certes, le terrain est important : il faut en premier lieu être un musicien complet, pratiquer au moins un instrument, être excellent lecteur, bon accompagnateur et surtout doté de cette impulsion à aller vers les autres que l'on désigne par le terme galvaudé de « charisme ». Les conseils qu'il donne à Olivier Dejours sont de bon aloi : pas d'analyses alambiquées ni de métaphores poétiques; battre la mesure, par exemple, sert à prévenir l'orchestre, rien de plus. Nous sommes loin des considérations métaphysiques d'un Celibidache et de quelques autres chefs gourous moins inspirés...

Faire durer les silences, interpréter un rythme, déployer une mélodie, faire chanter un instrument ou un groupe, autant de questions à la fois poétiques, analytiques et surtout pratiques. Marek Janowski s'appuie sur la structure de la musique pour lire entre les lignes et faire parler les détails les plus fins avant de transmettre son alchimie personnelle à l'orchestre. C'est pourquoi nous le retrouvons à la table avec son élève. À travers leur dialogue, nous comprenons qu'ils traquent les intentions secrètes de la musique afin de ne pas s'engager sur de fausses pistes qui seraient catastrophiques face à l'orchestre. Le souci de réalisation concrète guide le chef et ce sont toujours les questions d'équilibre musical qui donnent lieu à ses avis les plus percutants. Une lecture purement intellectuelle de la partition en fausse la réalisation car, rappelle-t-il, il faut s'adapter sans cesse aux salles de concert, mais également à la personnalité des orchestres et des chœurs que l'on dirige. Ainsi le voit-on se battre contre l'acoustique réverbérante du Dom de Cologne.

Aller à l'essentiel, tel est le secret de la clarté. Mais encore faut-il avoir les moyens de réaliser ses idées. « Ce passage, comment l'entendez-vous? » Selon la réponse de l'élève, le Maître, en bon pédagogue, suggère le meilleur moyen pour sa réalisation. Ainsi, petit à petit, le spectateur comprend pourquoi l'art tient à ces minuscules détails qui font toute la différence, et lorsqu'il retrouve les deux hommes face à l'orchestre comme deux pilotes qui se relaient, l'un plus expérimenté que l'autre, il peut enfin mesurer les difficultés du parcours. C'est alors un moment unique d'interprétation musicale et de pédagogie par l'image intelligente.

Les Leçons particulières de musique : douze émissions qui ont marqué la télévision française entre 1987 et 1991. Pour Oliver Bernager et François Manceaux, il s'agissait de saisir le vif de l'art des interprètes les plus importants de notre temps en situation de concert et surtout, d'enseignement.

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